Neuf de Mars


Souvent la légende recouvre le néant,
parfois elle n’est qu’un très pâle reflet de la réalité.

Philippe Soupault
Les Dernières Nuits de Paris.

    Voici à présent un peu plus de quatorze mois qu’un crâne humain nommé Gertrude est en ligne sur Internet.
    Gertrude apparaît ainsi sur un blog, Le Blog de Gertrude, qui au fil du temps est devenu triple avec Le Blog de Gertrude rose, puis Le Blog de Gertrude noire.

    Cette expérience représente une étape dans ma pratique plastique, aventure, quant à elle, commencée il y a une trentaine d’années.

    L’origine du « face à face » avec Gertrude trouve sûrement ses racines dans mon histoire personnelle dont je livre quelques bribes dans le texte Peindre des coquillages. Gertrude y a sa place parmi les coquilles trouvées sur mon chemin.

    L’aventure de Gertrude commence véritablement à une période, où une voie se précise dans le magma de ma pratique, ouvrant définitivement cette dernière à son absolue nécessité. Gertrude surgit à ce moment-là, sans véritable hasard. J’évoque cet épisode de mon existence dans le texte Collision initiale.
    Gertrude est présente depuis, mais s’impose dans mon activité de façon quasi exclusive depuis quatre ans.
    De modèle occasionnel, elle devient centre de mon intérêt plasticien dans la mise en œuvre de dispositifs de plus en plus complexes, pour enfin aboutir à sa mise en ligne. Ce dernier acte survient ainsi, dans une logique de sophistication de sa monstration. Je raconte l’évolution de ma relation au crâne Gertrude, le passage à Internet, et les tumultueux premiers mois du site de Gertrude, peu à peu devenu triple, dans le texte La Vérité en Gertrude.

    Il ne s’agit pas pour moi de redire dans ce nouveau texte ce qui a déjà été écrit, mais de jeter un regard plus distancié sur le chemin qui m’a amenée ici.    Je reprends ainsi la plume dans l’interrogation, qui de plus en plus m’habite, sur la nécessité ou pas de poursuivre l’expérience Internet de Gertrude, sur les finalités et limites de cette dernière, sur mes desseins avoués et inavouables de continuer le voyage et les raisons de plus en plus floues qui me font repousser l’instant fatidique où j’appuierai sur le bouton de déconnexion.
    Évidemment, cette fuite en avant à laquelle je m’abandonne, non sans délices, ne peut qu’être confortée et bercée, et donc prolongée par cet état de doute, et par tous les possibles que semble ouvrir le hasard sous mes pas.

    Aussi l’expérience de « Gertrude en ligne » apporte un éclairage rétrospectif sur ma pratique : la dérive du vaisseau Gertrude dans les espaces improbables d’Internet aligne en perspective la succession d’évènements qui l’y ont amenée, ou plutôt qui m’y ont amenée. Evénements que je suis tentée de fédérer sous le terme de « rencontres ».
    Je distingue cependant cette notion  de « rencontres » de la « Rencontre » (à laquelle je donne une majuscule) circonstance unique et rare où deux êtres, aux premiers regards, aux premiers mots, se reconnaissent chacun dans les yeux de l’autre, dans une réciprocité immédiate, savent avoir toujours été là avant d’avoir été, vivent soudainement plus fort ce supplément d’âme et, simultanément, meurent un peu dans la mesure de sa perte irréparable.
    Les rencontres, sans exclure pour autant les Rencontres qui ont décidé de mon maintien en vie, sont les petits cailloux de ma rivière. Robert Alexis dit au début de La robe : C’est un lieu commun de prétendre que certaines rencontres infléchissent le cours d’une vie, l’orientent dans une direction jusqu’alors insoupçonnée.
    Les rencontres sont les jalons de mon parcours, qu’ils soient les piliers des figures hiératiques de mon enfance, les modèles, artistes et maîtres de mes initiations, la modestie des êtres aux petites tâches, le magnétisme de certains lieux, l’écho puissant de quelques textes, la fascinante mémoire des objets trouvés, mais également les obstacles, les résistances, les frustrations et blessures d’âme. Autant de « collisions » qui ont fourni l’énergie de ma mécanique, qui ont alimenté le moulin de ma rage.

    Si j’ai lutté longtemps pour garder le cap, l’illusion de la cohérence, un semblant de maîtrise sur les circonstances, il me semble à présent (est-ce l’âge ?) que je me livre, pieds et poings liés, au hasard. Je lui ai fait un lit au sein de ma pratique, développant de plus en plus une capacité d’éponge, à absorber, m’adapter, et me déplacer au gré des flots de mon aventure, posture qui trouve toute sa raison d’être dans ce dernier épisode cyber.
    Paradoxalement, je perçois cette démarche, permise par les « nouvelles technologies », comme presque moyenâgeuse, comme un départ vers l’inconnu depuis la forteresse rassurante de ma sphère intime, telle une quête par-delà les contrées fantastiques, à la merci d’ailleurs inquiétants où tout fait signe dans un monde de merveilles et de sortilèges. 

    L’étrangeté de l’espace Internet semble tenir à la distorsion des rapports spatiotemporels qui lui sont propres. Une distorsion qui se répercute directement sur les relations qui s’établissent entre les personnes : chacun joue de la plasticité des limites de son site, mouchoir de poche de son ego, absurde intimité, dans un jeu non maîtrisé, de toute façon non maîtrisable, avec un cosmos immatériel dont l’expansion supposée lui donne le vertige et dont il redoute et souhaite le voyeurisme. Les distances réelles, pourtant à l’échelle d’un pays, voire du monde, s’abolissent dans un contact direct, dans une proximité et une familiarité d’emblée établies, où l’affect s’invite brutalement.
    Telle est la « rencontre » sur Internet, violente, émotive, déstabilisante, presque dangereuse si on perd la conscience de sa singularité, si on ne revêt pas d’armure analytique.

    Il me semble que mon projet initial (que je décris dans le texte La Vérité en Gertrude) qui était d’entrée, de considérer Internet comme matière à réflexion, m’a permis de rester armée, de ne pas me laisser désarçonner par mon émotivité ou de ne pas me noyer dans l’affect, bien que j’eusse, depuis, semé quelques plumes de ma carapace. Je peux prétendre ( fi de la modestie),  n’avoir jamais basculé au-delà de l’équivoque, dans d’illusoires sentiments autre que l’amitié (mais le terme est-il juste ?) avec mes interlocuteurs, même si j’ai entrevu avec certain les limites du jeu.

    Là, j’ouvre une parenthèse pour vous rassurer, vous qui me lisez, que vous soyez fidèle interlocuteur de Gertrude ou simple passant : Mes intentions  ne sont en rien d’aboutir à des « rencontres » d’ordre réel, et  ma démarche n’est aucunement le reflet de ma « vraie vie » ou d’un vide affectif justifiant de tels desseins ; mais plutôt celle de tenter une forme de communication autour, ou plus précisément à travers ma pratique, de constituer cette communication en tant que paramètre de l’expérience particulière de la construction de ce blog, dont l’objet central est la non moins particulière Gertrude. Je tente ainsi de dépasser par cette communication, la banalité de la courtoisie pour amener l’échange à être événement  moteur de cette construction, quitte à employer les moyens de la séduction et de la provocation.

    Il est impossible d’atteindre le sens de ma posture sans considérer Gertrude comme le pivot incontournable de mon entreprise.

    Certes, reste humain, squelette vide, indice d’une existence oubliée, Gertrude est rangée depuis longtemps par moi au rayon des petites divinités domestiques. Aussi familière et inoffensive qu’un héritage de famille, elle en a la dérisoire valeur.
    Pourtant, en ce lieu d’Internet, ce modeste Lare perd sa neutralité d’objet inerte, se réactivant à la croisée d’un ridicule, juste assez ridicule pour être tourné en dérision, et d’un inquiétant, juste assez inquiétant pour ne pas se faire oublier.

    Dans cet espace virtuel, exposée aux yeux de tous, la figure de Gertrude (j’emploie « figure » au-delà de la notion de face, plutôt dans le sens de la Métaphore ou topographie d’une nébuleuse) reprend à son compte, toute la symbolique de la Tête de mort, emplissant le puit sans fin de son crâne et l’obscurité de son regard du paradigme de la Mort. Elle devient signal, probablement un peu effrayant, au frontispice de son triple espace, surgissant à son ouverture, sur l’écran du navigateur hésitant.
    Elle est déclinée à tous les étages de ses trois sites, tantôt comme objet, tantôt comme sujet : Elle apparaît tour à tour par ses représentations mises en scènes  dans des réalisations plastiques tout à fait tangibles, également comme avatar virtuel d’un moi que je lui prête.
    Là, réside sa raison d’être : être simultanément raison et moyen de l’échange. Être Interface, la face placée entre ce que je projette et les perceptions, les réceptions de l’autre. Elle oppose aux regards un aspect suffisamment labile pour ouvrir, par-delà sa physionomie fuyante, une cosmogonie de fantasmes, autant de possibles d’existences , de mémoires, de désirs et des destinées dont on veut bien la doter ; elle sait que batifoler avec la Mort, dont elle frôle le tabou, révèle nécessairement la présence d’Éros au côté de Thanatos.

    Gertrude, la pathétique, s’accroche, dans les yeux de ses interlocuteurs, au moindre lambeau d’humanité encore collé à ses os.
    Gertrude respire, parle, aime… Bien sûr, tout cela par mon truchement.
    Personne n’est dupe ; ni mes interlocuteurs, ni moi, ni Gertrude.
    C’est un jeu, aux ficelles volontairement grossières :
    Gertrude, sous prétexte de résurrection, emprunte ma voix, mes mains, mon ego ; je revêts, quant à moi, son masque de Mort.
    Gertrude se nourrit des derniers feux de mes complaisances ; je me vautre dans le néant de ses orbites.
    Gertrude existe, elle plaisante ; je ricane avec l’élégance du désespoir.
    Gertrude devient invincible ; d’aucuns pourront prétendre que je caresse et apprivoise ma fin, que je joue les Vanités ou me joue de la Vanité.

    Vanité grimaçante des masques de James Ensor qui cachent en révélant, qui occultent les apparences et retournent comme un gant les intérieurs putrides.
Mais la dualité s’avère insécable : Gertrude ne peut être moi sans que je sois elle ; de la même façon, ce que je présume être la perception de l’autre n’est fatalement qu’une projection de ma part ; Ce « Gertrude-moi », vraisemblablement, n’appartient plus à Gertrude, ne m’appartient plus. Il n’est ni Gertrude ni moi, car nous y avons mélangé nos brumes.

    La seule chose qui subsiste, aussi virtuelle qu’elle soit, est l’image de Gertrude, ce que l’œil perçoit sur l’écran qui serait une Gertrude mise en image, mise en mots, par des photographies, des vidéos, des images numériques et des textes ; la preuve paradoxalement rassurante de l’existence du référent Gertrude en tant qu’objet posé dans l’étagère d’un espace réel.

    Gertrude n’est rien, rien qu’un objet, vide de mémoire, laissant béant ses territoires…
    Dans le temps suspendu
    Je vous espère

    Gertrude
    Gertrude et moi
    Gertrude et vous
    Vous et moi.

Juliette Charpentier
Paris, le neuf mars deux mille neuf

26 réflexions sur « Neuf de Mars »

  1. De ma Réduction dadaïsto-jansénisto-tolstoïenne du dessous d’un volcan en sommeil, j’ai posé cinq minutes mes yeux sur vos derniers articles du « triplet gertrudien » et je me suis dit : – Vivement que le Printemps revienne, vivement la Résurrection des âmes, vivement qu’on en termine avec ce fromage jaune-pisse et que l’on passe au dessert…Et puis après j’ai pensé qu’en fait Socrate avait fait le bon choix et qu’alors il n’avait pas perdu la tête dans les mauvaises boissons et qu’ainsi lui aussi jouait pour passer le Temps.
    Vite ma Vervène, il est déjà 22H46 passé !

  2. Armengol, vous êtes bien ésotérique ce suaire!
    J’ai beau faire fonctionner mon petit vélo analytique, je n’arrive pas à déceler si votre com est dadaïste ou jésuite.
    Je pencherais bien pour la deuxième solution; (qu’est-ce qui vous déplait dans mes articles?) dans ce cas là je vous demanderais de vous pencher un peu vers la droite de mon blog jusqu’à un petit groupe de petits jésuites qui vous donne un petit conseil..
    Mais j’espère que je me trompe.

    Vive le printemps quand même

  3. Lettre promise à ce 9 mars: j’ai donc lu ce texte, puis Collision initiale ,La vérité en Gertrude et Peindre des coquillage( déjà survolé au hasard).
    La citation de R.Alexis est parlante. Les rencontres, certaines rencontres sont loin d’être anodines. »J’ai fait du roman une arme de combat: l’histoire importe peu; seul m’intéresse ce que le lecteur est capable de partager…Le sujet, vous l’aurez compris  est un leurre. D’ailleurs d’apparition récente dans notre culture…Je ne crois pas à l’unité de nos personnes. Mon lecteur idéal ne s’arrête pas au récit. J’aimerais que chacune de mes phrases soit pour lui un point de départ » (R.A)
                 Ma rencontre avec cet auteur fut une rencontre de hasard. La nôtre, Gertrude, aussi. Fraîchement débarquée (embarquée sur la toile) elle m’apparaît relever de cette part intuitive de la vie, de nos vies.
           Votre parcours est large. Votre personnalité bien trempée! Un caractère.
    Mettons de vous à moi clairement les choses au point (rien n’est jamais clair, ce serait trop simple).Je m’inscris dans une marginalité pas choisie, imposée. Et d’un!
    Pas d’instruction, pas de parcours d’études comme je l’aurais espéré. Hélas ! Hélas?
    Oui. Tout fût fermé. Raisons délicates à exposer ici.
    Mon moteur: la passion des mots, de l’art, autodidacte à part entière. La recherche d’un dialogue avec l’autre. (Des années de claustration subies)Alors!…Le dialogue, hein ???
    Bref, passons. Votre voix m’a touchée, justement par son absence de prétention, et je suis sensible aux voix. D’autant que ma vie m’a menée, hasard ? combat ? à me servir de la mienne (manifestations diverses, poésie, théâtre et théâtre « perso » ( 180 cassettes audio de 90 minutes avec introduction de musiques appropriées à l’ambiance ,ici et là, seule à tout faire: mon exigence. Le contenu: une sorte de roman écrit dans des transes visionnaires, comme dicté par une communication extérieure).
      Je suis aussi à la croisée des chemins. Pour des motifs différents.
    C’est très égoïste: restez sur la toile encore un moment. Je désire poursuivre cette amitié avec vous. Pourtant bien eu des déboires de ce côté. Je suis de ce caractère qui effraie les crânes jaloux, poseurs, fades ou formatés. Je suis une sauvage. Je fascine. Parfois. On m’aime ou on me déteste. Très tranché.
       Puisse ces mots recevoir quelque écho en vous.
    Votre expérience de la morgue m’a plus qu’intéressée. Vesal, les anatomistes je me suis penchée là-dessus (dans mes cassettes…)
    Je sors d’une longue fracture( poignet  droit, douleurs physiques. ,morale. Complication du cas avec algoneurodystrophie…mal mystérieux s’il en est.)
    Fracture d’os, fracture d’âme. Symbole. Evidence d’une remise en question de soi.
    Mon lambeau d’humanité (je reprends votre expression) est là. Je suis bien consciente que cette réponse est défaillante à votre rentrée. Pardonnez-moi.
    Et si la vraie était absente?
    « Nous avons mélangé nos brumes » dites-vous. Belle image qui est reflet de réalités qui nous dépassent.
    Ensor ?oui Ensor un peintre qui ricane avec élégance. L’élégance de nos désespoirs se parent du masque audacieux de nos fringants espoirs.
    Et alors.
    L’important c’est d’aller d’un jour à un autre, de voir ce que ce jour va apporter.
    Privilégier la JOIE d’un instant en dépit des malheurs d’avant!
    Capitaine!
    JE VOUS ESPERE…A nos perceptions, à nos réceptions réciproques si vous le voulez bien.
       Ce sera tout aujourd’hui.
         Amicalement et dans la sincérité.
                        Votre Hécate
    <o:p></o:p>

  4. Merci à vous .A ce soir
     A relire j e découvre des mots manqués(la vraie vie absente par exp.).
    Des manquements orthographiques( et pour causes…Tout fou « le camp »!
    Je plaisante…Mais tout est vrai dans ce que j’ai dit ci-dessus).
                           A retrouver Juliette…
                                  Ne puis signer ici qu’Hécate

  5. Allons restez quoi! Je suis sûr que Gertrude a encore énormément à dire aux pauvres mortels que nous sommes,  avec toute l’éternité devant elle…
    Cordialement votre  

  6. Chère Hécate,
    Les sauvages parlent aux sauvages ; les sauvages touchent le cœur des sauvages…
    Beaucoup d’émotions aujourd’hui : d’abord l’arrêt brutal et inattendu du blog de notre ami commun Peregrinus et … Votre commentaire ; ou plutôt ce texte en regard du mien qui raconte ou qui suggère vos blessures de physique et d’âme. Et votre confiance à vous livrer ainsi à un crâne inconnu…
    Mais arrêtons, l’instant de ce commentaire, le jeu, pour admettre que vous vous adressez à moi, Juliette, Capitaine de ce vaisseau.
    C’est bien moi, Juliette, qui ai écrit ce texte. Si « j’analyse » mon travail, c’est justement qu’il y existe un noyau irréductible à l’analyse ; si je parle d’armure, c’est qu’il y a un défaut dans la carapace ; si je suis ici, c’est que l’ailleurs ne me satisfait pas ; si je fais la forte, c’est pour révéler ma vulnérabilité…
    Car sauvage je suis (pas avec le même parcours que vous), sous un aspect « normal » socialement reconnu et parfaitement identifié. Et pourtant je suis en constant décalage avec le monde qui m’entoure, j’ai toujours vécu détachée de moi-même (décapitée) dans un monde parallèle. Il y a chez moi des zones d’ombre (et c’est bien pour cela que les lectures de Lautréamont et de RA me bouleversent) . Rares sont ceux qui ont décelé mes failles ; ceux-là se taisent car ce sont leurs failles qu’ils voient en miroir. Je contiens en moi une forme de violence, de révolte ; c’est cela que vous prenez pour un caractère bien trempé ; c’est une expression qu’on utilise aussi pour le verre : le trempage du verre ne l’empêche pas de se briser, cela retarde juste le phénomène. J’ai grandi dans la brousse et ne suis pratiquement pas allé à l’école ; enfant, je fuyais les enfants : leurs cris, leurs rires me paniquaient. Maintenant je côtoie beaucoup de monde, je prends souvent la parole publiquement mais je continue à fuir : Ma hantise est de me laisser submerger par l’émotion que susciterait en moi une trop grande proximité avec les autres.
    Ce n’est probablement pas un  hasard si je suis ici sur Internet en ce lieu de distorsion où les distances sont faussées ; faussées au point qu’il peut arriver ce qui se passe maintenant entre nous, inconnues réciproques, et qui ne se passerait sûrement pas, en tout cas pas aussi vite dans la « vraie vie ».
    Car ici la proximité est grande mais aveugle ; elle est débarrassée de l’apparence et des raisons sociales.
    Nous sommes dans une certaine « nudité » des relations humaines ; les masques sont là mais  sont de dérisoires protections.
    Internet permet « l’obscénité », la mise en avant de ses intérieurs au regard de tous , une mise à nu aux pouvoirs cathartiques . Catharsis, un « gros mot » bien connoté, mais je n’arrive pas à en trouver d’autre ; pourtant les universitaires me gonflent, ceux qui se prennent pour des artistes intellectuels aussi ; je n’ai jamais été à l’université ; bricoleuse, je suis une praticienne passée dans les mains psychodramatiques des beaux-arts ; j’aime les autodidactes qui n’ont pas ce formatage, leurs démarches contiennent donc tous les possibles de l’imprévisible.
    C’est bien pour cela que j’ai banni de mon blog tous les porteurs d’istes , Freud et les donneurs de leçons.
    Mais voilà, ce blog (vilain mot), cet espace, comme s’il était l’expression de mes mondes secrets a pris beaucoup d’importance dans ma vie ; au point que je me suis posé la question de son importance, de ses tenants, de ses aboutissants, et de son rôle dans cette vie…
    J’ai décidé d’accepter de flirter avec « l’obscène » (et là, j’ai la musique de RA qui résonne dans mon crâne) dans le sens où obscénité serait d’accepter de libérer ce qui est oblitéré, bien tassé au fond de soi, cette saleté qui échappe à la raison, cette crasse et cette obscurité (encore RA) de sa part de démence (que je sais également nichée dans le cœur inextricable de la pelote de ma pratique).
    Vous m’émouvez Hécate car vous avez vu mon obscénité et que vous me la présentez en miroir.
    Vous m’émouvez au point que vous m’avez fait peur et que j’ai arrêté mon blog une semaine…
    J’ai eu peur de cette intrusion, de votre regard implacable, de votre émotion à la découverte de mon espace.
    J’ai pris le temps de réfléchir ; ce n’était pas vous qui étiez en cause mais moi…
    Au fil de cette entreprise, il aurait été logique que je me blindasse ; or c’est le contraire je me dépouille de plus en plus avec le temps. Vous pouvez trouver  dans le déroulement de ce blog, dans la succession des articles toutes les peaux que j’ai laissées, les plumes semées, les oripeaux de mes émotions, les mues de mes intérieurs.
    Ce blog a commencé très fort, de façon fulgurante sur une rencontre incroyable (vous l’avez sûrement lu dans le texte Vérité ); je parle bien sur de l’interlocuteur avec lequel j’ai conversé six mois quasi quotidiennement, avec lequel je suis entrée dans une connivence absolue, immédiate, dans une proximité violente ; cette personne a priori si différente de moi mais avec laquelle il y a eu tout de suite du tacite. Nous sommes passés par toutes les émotions  jusqu’à la souffrance. Le blog s’est construit sur cet échange, presque en symbiose, garde les stigmates d’émotions rémanentes, il est pétri de cette conversation…
    Ce fut une expérience incroyable mais assez éprouvante, que j’ai vécue avec une certaine inconscience.
    Votre commentaire me touche d’autant plus qu’il arrive maintenant dans cet état de questionnement…
    Mais suis-je digne de ce que vous me confiez ?
    Amitié

  7. Si c’est vous qui le demandez…
    Je vais réfléchir…

    C’est vraiment gentil (pour une fois) Émile; vous savez parler aux crâne ce suaire.

    Éternellement votre
  8. C’est moi Juliette, Jepense à vous , je ne dors plus, j’ai lu hier soir votre réponse avec bien de l’émotion.Ce vieux coeur a connu des émotions ; dès notre premier échange j’ai senti qu’ il y avait un être exceptionnel , vous.
    Je vous ai fait peur. C’est le drame de toute ma vie de causer cet effet aux seuls personnes dont l’amitié me serait précieuse…Je suis loin d’être légère, même si j’ai une folle envie d’être joyeuse ce qui n’est pas incompatible avec la profondeur .
    Je ne veux pas êrtre mise sur un piedestal!!! J’ai entendu ça trop souvent, c’etait un rejet qui me fait souffrir encore.
    Vous êtes comme du verre…Je sais ce que ça veut dire, un rien me brise et je crois avoir été brisée tant et tant,que je ne sais comment je suis là encore, avec ce couturage de cicatrices de toutes sortes; le corps( ma vue est précaire ,des yeux qui ne savent encore combien de temps ils pourront lire, écrire…Alors oui je veux donner le maximum tant que c’est possible, vivre des choses intenses parceque je suis sans tiedeur .
    Mon regard n’est pas implacable, il est lucide ,mon  âme perçoit les failles mais ne juge pas .Enfin quelqu’un qui a avec moi des points qui pourraient se ressembler…
    Deux « sauvages » s’apprivoisant est-ce effrayant?
    Je ne connais pas tout de votre aventure sur le blog . J’ai lu le texte « la vérité »…
    Cette relation virtuelle vous a marquée, j’en ignore l’issue encore, je débarque sur le net et je patauge et n’ai pas honte de le dire.
    Je ne veux leurrer personne,à quoi ça sert de tricher sur soi si on veut ne pas aller se ramasser? Je suis ce que je suis…comme vous êtes Juliette ce que vous vous êtes, ce quela vie vous a faites, où ce que vous avez pu faire avec ,avec toutes ces différences, ces peurs que vous avez , que j’ai aussi…Et alors?
    Si le « hasard » nous place ici, il y a une raison . Pourquoi seriez-vous indigne de ce que je vous confie ici ?Mon âme n’éprouve pas de méfiance envers la votre bien au contraire, ma perception » magique » ne me trompe guère ,surtout cette année .Je ne m’entends pas avec ceux dont le parcours fût sans embûches car il me voient comme une »tarée », une « ratée » où un être  trop bizarre: pas d’étagère où me cataloguer!!! c’est embêtant .
    Je suis aussi capable d’une fidélité qui étonne, je ne cherche pas à attacher l’autre de force, c’est dans la liberté qu’on se découvre le mieux, qu’un lien libre apporte la richesse intérieure, j’ai compris cela ces derniers mois mais c’est difficile à exposer ici.Pour ce qui n’engage que moi je puis dire; mais la confidentialité d’autrui m’est sacrée…Comprenez à demi mots chère Juliette.
    Acceptez un peu de parcours avec moi, acceptez-moi pour miroir vous serez peut-être surprise…Je ne suis pas de ces glaces déformantes qui accentuent l’horreur, l’horreur ne réside que dans le refus d’accepter les différences de l’autre.
    Comme dans les contes ,c’est une question de perspertives.
    PEREGRINUS aurait fermé son blog?Il m’a laissé une si belle poésie après genet!!!
    Je voulais répondre de suite mais avec ces satanés problèmes de connexion je n’ai pas pu…J’ai du mal à y croire…
    Le printemps m’a toujours jetée dans le désespoir, cette année j’ai tout lieu de penser que cela changeait….
    Je suis là…Ne nous quittez pas…
    A bientôt…dans un océan d’AMITIE !!!
                                                  Votre Hécate

  9. Il ne faut pas que vous perdiez le sommeil au fond de ce triblog d’enfer, Hécate. Et je crois, si j’entends bien, que la priorité est de prendre soin de vous; je suis sure que votre moitié, vu comme il vous a amoureusement peint, doit être à vos côtés. Quant à moi, ne faites pas cas de mes peurs; ce n’est pas un drame mais juste un de mes nombreux travers: j’ai peur en général de la nature humaine, la mienne en premier. Je voulais être gardienne de zoo quand j’étais petite…
    J’apprécie votre extrème intelligence et votre sensibilité qui a su percer à jour Gertrude.
    Explorez ses blogs avec sérénité, tracez y votre chemin, trouvez ce qui vous attends; je ferai le mien dans votre espace où j’ai déjà trouvé mon miel..
    Peregrinus a arrété pour des raisons personnelles; il viendra nous voir de temps en temps…

    Bien à vous

  10. Moi, encore, oui .Prendre soin en priorité de moi? Je le fais en me tournant vers qui peut avoir à dialoguer avec moi.Le corps est dépendant de l’âme ,ce n’est pas à vous que je vais apprendre cela .La douleur, processus d’apprentissage perverti.
    L’âme qui fuit s’échappe la perfide et attaque le véhicule,le corps tant qu’elle n’aura pas accepter de concevoir une acceptation d’harmonisation.
    Cette année ,j’ai appris pas mal sur moi, non sans douleur. Je ne regrette pas d’être passée par -là.Le cadeau:c’est l’autre, c’est aussi le guérisseur.
    J’ai essayé de transgresser mes peurs, mes échecs, mes à prioris. Dur, mais cela ,en retour une correspondance avec une personne jamais vue a enrichi ma largesse de vue intérieure . Seul on est seul…Vérité de bazard!
    Peu d’amitiés très hautes certes. Mais quand elles surviennent la vie s’éclaire sous un autre angle.
    Chère Juliette ,prenons-nous par la main, virtuellement, c’est pas si mal. Je ne voulais vous effrayer, il y a des courants d’air aux carrefours, et je suis une frileuse.
    J’irais dans vos sentes comme je peux; vous serez la bien-venue dans les miennes, butinez le miel…Si vous saviez: j’ai eu une histoire avec des abeilles .Un essaim d’abeilles est venu un jour se réfugier chez moi.J’ai eu peur d’abord…Ca vous intérresse la suite?…
                         Votre Hécate

  11. Ah!!!….L’échange ,jn’ai rien contre…mais un essaim et ces histoires de Sainte…vierge et la lectures des commentaires qui suivent…dure sera la chute!
    Si je commençais par remonter au ciel ? C’est une idée pas si mauvaise. Vous regardiez les étoiles et moi au même â nge que le votre j’essayais d’attraper Lune dans un seau d’eau. On m’avait dit que c’était possible et comme je n’avais ni trouvé ni perdu la foi eh! bien j’y croyais un peu . Le seau d’eau en fait comme je suis de la constellation de Ganymède( voir « Les Lusiades » de Camoens un bourlingueur d’océan aussi celui-là, doublé d’un poète et d’une vie pourrie…) ça m’allait. Naître Verseau c’est mon ére donc et j’erre sur le net, j’écume, je cherche un trésor…et c’est le trésor qui me trouve( VOUS!) Cela s’appelle l’art de plaire ,du moins c’est pas du toc, et c’est la vérité pure.
    Vous ne contestez pas?
    Vous brodiez enfant. Je brodais aussi ,des éléphants au poit de tige.
    Des points communs si j’ose dire.
    Après j’ai brodé des roses( mon enfance l’était pas. Si ça vous dit on pourra y revenir…)Après j’ai brodé des nappes à thé où je savais que je ne boirais jamais le thé …le début du désepoir…Le thé y en avait jamais chez nous et des amies, alors je pouvais pleurer dans les rivières des mouchoirs, car la « rivière » c’est un point de broderie, des amies où je les aurais rencontrées? On m’enfermait comme un princesse sans TOUR alors j’étais Cendrillon, mais vu que j’aimais pas la soupe au potiron, le carrosse je pouvais faire une croix desus( je brodais aussi le point de croix( le canevas)Celui de mon histoire traîne.
    Vous voulez l’histoire de l »essaim d’abeilles?
    promis vous l’aurez .Le prélude vous va-t-il?
    ( c’est un coquetterie de magicienne pour être sûre de vous revoir!
    Il m’est arrivé un vrai tour magique ce tantôt?
    C’est vos sorcelleries???
    Mes clefs! eh!bien j’ai  dû découdre la doublure de mon sac à main. Les clefs étaient passées de l’autre côté sans un trou!!! JURE !!!
    J’étais si-dé-rée!!!!La Magie! Ya des jours où on maîtrise pas!
    L’émotion.Ca doit-être un répercussion de l’ émotion.
    Je vous la dit après l’histoire des abeilles…j’ai aimé la votre, vous avez des bontés pour moi.Merci Juliette, Gertrude( ya pas un autre nom quelque part?
    ( Ma grand-mère paternelle s’appelait Juliette. Jamais vue( sauf en photo, vous aussi avec un chapeau noir. Super allure! sur cette photo!)
    pardon …l’histoire ça vient après , mais  si la connexion déconnecte je vais perdre ce texte.Alors j’envoie!
                    Hécate

  12. Ma soeur sur ce coup là c’est perverse, ça aurait fait très bien avec la nappe à thé avec les roses! C’est râlant et les têtes sont mangées, alors!moi j’ai la nappe à thé encore…J’ai pas encore arrêté la date d’enterrement…Je la mettrais sur mon testament…si j’en fais un…Merci Gertrude de l’invitation posthume…(sans rrmords…aucun…enfin faudrait creuser…on sait jamais , les remords ça vient au moment où on s’y attend le moins, comme les fantômes…
    Allez tendresse pour tendresse…j’ai habité un lieu hanté( pour une magicienne…)
    J’ai un crâne dans la chambre et un corbeau en plastisque dans l’entrée( pour tromper ceux qui entrent…comme ça les vrais ont l’air faux!
                       Hécate( votre « Hécate »)

  13. le maître de ma.ison va rentrer et je dois aller côté cuisine.
    Les histoires plus tard ,je garde l’essaim au chaud :prochain service chère âme
                       
    Dévotement
                     Hécate

  14. Voyez-vous, chère sorcière, par ce monde, il y a ceux qui ont la nappe et ceux qui ont le sucre..
    Tout le monde ne peut pas être Martine qui a quatre enfants et un mari merveilleux. Mais at-elle un corbeau en pastique dans l’entrée, elle?

  15. Ca va être bref…les connexions!!!Cette boîte de relais a des problèmes!
    Ah! un corbeau en plastique dans l’entrée avec des yeux flamboyants qui ne fait hurler les vrais, ça doit pas être n’importe qui !!!
    Les vrais ne supportent pas lamoindre bricole de couleur noire qui entre. ici.Ce que je porte moi est toléré .
    Les trois corbeaux( tous des mâles) vous croassent leurs aimables bonsoirs…
               Votre Hécate( et moi de même: le bonsoir aimable et aimant )

  16. Après ce bonsoir que vous me fîtes, la connexion a totalement été sectionnée, même le « relais » du maître du Chaos n’était plus…CHAOS TOTAL!!! Je le sentais venir ce coup -là.
    Donc après des heures d’attente chez le fournisseur, lui-même en rupture de connexion, après un chaos réel dans la pièce où est le branchement de tout cet inextricable technologie à laquelle je suis totalement inadaptée, je tente de voir si tout refonctionne de mon côté.
    Mes trois corbeaux…diffèrent dans leurs comportements .
    Que vous ne soyez pas fille corneille ne poserait aucun probléme au freux si vous aviez le privilège de lui plaire…C’est le plus sauvage des trois, c’est un charmeur né, un élégant, un gandin, un dandy…Il déploie des prouesses inouïes pour enjoler, masculin où féminin peu lui importe si « son » coeur » est pris!…
    Pour l’heure , ce sera tout, j’attends de voir comment réagira cet « engin ».
    Espérant que vous allez bien, mes pensées amicales vers vous.
                     
    Hécate

  17. Je sais ce qui vous arrive: vous avez un Crâne coincé dans vos connexions; vous avez dépassé la côte d’alerte.
    Le prochain article vous sera particulièrement destiné…

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