La vieille plaque et ses « vain » impressions.

Pour clore cette année Oscolaire
la Crâneuse graveuse
vous offre en vain impressions
l’expression de la patience
d’un zinc quadragénaire.

JC, Manière noire et aquatinte sur plaque de zinc, épreuve N°20 sur papier aquarelle, 24 x 30 cm.

La plaque de zinc date de mes études à l’École des Beaux-Arts. Témoin du peu d’intérêt que je portais alors à la technique de la gravure, elle est restée inutilisée pendant quarante-cinq ans, trainant au fond des cartons de mes multiples changements de lieu. Elle porte les stigmates de ma négligence, sa surface ayant perdu planéité et éclat au contact de matériaux et médiums divers.

En septembre 2023, j’intégrai un peu par hasard un atelier de gravure, technique qui jusque là m’attirait peu tant je la jugeais rigide et étroite. (Un apriori probablement forgé lors de mes études aux Beaux-Arts après une très brève participation au cours de gravure dont je m’empressai de fuir l’enseignant.)

Ce fut une révélation et la mise à bas de mes idées reçues. Et quoi de mieux pour acter cette découverte que d’exhumer cette vieille plaque qui attendait patiemment que je m’y intéresse; de négligée je ne l’avais pourtant jamais oubliée.

Je bichonnai sa face meurtrie, en nettoyait l’oxyde pour en retrouver le poli, « berçait » longuement la plaque d’un geste répétitif du poignet pour y créer une trame éprouvant ainsi par la technique de la « manière noire » la résistance du matériau et l’humilité qu’il m’imposait.
Je décidai de saturer peu à peu la surface de motifs, crânes d’animaux et coquillages, les faisant apparaitre par polissage, passant du rugueux au lisse, du noir de l’encre retenu dans le relief produit par le berceau au blanc du vide créé par le brunissoir.

Je pris le parti d’en accepter toutes les épreuves, l’incertitude des encrages et des impressions, l’imperfection et l’accident.
Cette plaque de zinc quadragénaire, gardée si longtemps à l’abri des regards, révèle maintenant sa part d’ombre et de lumière. 

Ce fut le travail d’une année, je m’arrêtai à vingt.


Cela fait exactement
seize ans et six mois
que Gertrude vous sert
un petit verre de vain
sur le zinc.