Gertrude, faire œuvre ?


JC, octobre 2023, photographie numérique montrant un ordinateur portable sur l’écran duquel est affiché une photographie numérique prise en extérieur montrant un ordinateur portable sur l’écran duquel est affiché la première page du Blog de GertrudeS ainsi que deux carnets ouverts posés légèrement décalés sur le clavier, l’un à couverture rouge comportant de l’écriture au stylo bleu, l’autre un dessin au crayon aquarellable reprenant des éléments de la page affichée du blog, ainsi que deux carnets posés légèrement décalés sur le clavier de l’ordinateur, l’un étant le même que sur la photo affichée sur l’écran et ouvert à la même page, l’autre étant le même carnet de dessin mais ouvert à une page différente sur laquelle est représenté de manière approximative au crayon de couleur aquarellable ce qui est affiché sur l’écran de l’ordinateur. Différents objets entourent l’ensemble et suggèrent une table de travail.

L’objectif serait de réaliser un « objet » matériel, un « ouvrage » dans l’espace réel à partir de la construction virtuelle que constitue mon blog (le blog de Gertrudes) depuis bientôt seize ans. L’idée la plus réalisable est à l’évidence un objet papier, en quelque sorte un « livre ».

Cette entreprise m’a été suggérée par une amie à partir du constat de la vulnérabilité du blog, d’autant plus fragile qu’il est énorme avec ses 1022 articles et ses quelques 20000 commentaires. Un bug et tout peut disparaître en une fraction de seconde.
L’idée folle de cette « fabrication » me trotte à présent dans la tête avec un certain nombre de questionnements et de problématiques :

  • Ce qu’il est possible de transposer du blog au livre.
  • La forme matérielle que pourrait prendre ce livre et ces transpositions.
  • Le sens de lecture du livre.
  • L’intelligibilité du livre et sa part explicative.
  • Et enfin les véritables raisons qui me pousseraient à me lancer dans ce travail qui s’annonce gigantesque et peut-être infaisable.

Il est évident que cette liste de questions n’est pas exhaustive et qu’au fur et à mesure de mon avancement d’autres vont se soulever.

Reprenons à présent ces premières interrogations :

La transposition du blog au « livre » concerne différents éléments constitutifs du blog : en ce qui concerne les articles : du texte plus ou moins long (soit mes propres écrits soit des citations) et des images fixes ou animées, photographiques ou cinématographiques ; sous les articles encore du texte par les commentaires écrits par mes interlocuteurs et mes réponses à ces derniers.

Certes dans les articles, je pourrais considérer que tout n’est pas forcément transposable ou plutôt n’est pas suffisamment intéressant et signifiant pour mériter d’être retranscrit sur papier. Je pense surtout à la première année du blog, probablement la plus tumultueuse mais aussi la plus « fourre-tout » lors de laquelle j’ai publié tout et n’importe quoi sous n’importe quel prétexte, tant j’étais dans la découverte passionnée de ce nouveau « médium ». Cela pointe, bien sûr, la question du choix et presque d’une autocensure sur des publications qu’à présent avec la distance je trouve sans intérêt ; mais peut-être faudra-t-il justement considérer que cette vision du blog de 2023 sur 2008 pourrait en fausser l’authenticité première.

Choix il y aura probablement mais avec, à chaque fois, une réflexion consciente sur la place du détail par rapport à l’ensemble.

En ce qui concerne les commentaires, il est évident qu’il me sera impossible d’en retranscrire l’ensemble tant ils sont nombreux (plus de 20000), mais je me dois d’en extraire quelques échantillons, témoignages de l’inventivité, de l’intelligence et de la pertinence de mes interlocuteurs depuis le début de cette aventure.

Cela m’amène à aborder la question de la forme que prendront les transcriptions et par conséquent la forme même du livre.

Il tombe sous le sens que le texte est naturellement matière du livre et ne sera pas si différent sous une forme dactylographiée de ce qu’il est dans le blog ; car le retranscrire de manière manuscrite serait non seulement une folie chronophage mais s’avèrerait peu signifiant : le texte ne faisant pas « image » dans le blog et restant toujours plus du côté « visible-lisible » que « visuel ». La seule mise en forme de ce texte serait d’en distinguer les catégories par des polices de caractères différentes ; à savoir ce qui serait du texte extrait des articles du blog, du texte des commentaires et du texte explicatif, ce dernier étant un rajout incontournable afin d’accompagner mon lecteur dans la compréhension d’une construction devenue inextricable. Mais je reviendrai sur l’aspect « explicatif » de ce projet.

Quant aux images, elles sont, comme il est dit plus haut, de deux natures, photographiques et cinématographiques. Les photographies montrent soit des objets (réalisations matérielles ou autres) ou des compositions mettant en scène divers éléments, parfois le crâne Gertrude ou ma personne. Les vidéos (qui ont disparu pour la plupart dans le dernier transfert de plateforme) sont soit des petites animations, soit des témoignages de sortes de performances réalisées devant la caméra. Contrairement au texte qui serait transposé sans trop de modifications, les images méritent, à mon sens, un traitement différent. En effet, malgré la présence du texte qui les contrebalance, elles restent le pivot central, la voie d’entrée en matière de l’article et la raison d’être de l’objet du blog, à savoir « Gertrude » qu’il soit abordé de près ou de loin. Ces images sont des photographies ou des vidéos qui opèrent déjà par le biais de leurs médiums une distance avec ce qui est photographié et filmé, tout en créant une « fenêtre » sur un espace très « matériel ». Restituer à l’identique ces photographies et ces vidéos serait nier l’importance de cette distance et créer une confusion entre photographie et objet photographié, entre virtuel et espace réel. Traduire le blog, objet virtuel, par la matérialité d’un livre papier est une sorte de retournement de situation et le jeu consisterait pour les images, de parcourir la distance à rebours en les traitant de la manière la plus matérielle qu’il soit, voire la plus triviale. Ainsi par exemple représenter les photographies et les extraits vidéos (et non ce que ces photographies ou ces vidéos représentent) à l’aide de médiums tels le crayon de papier et le crayon de couleur aquarellable, techniques nomades mobilisant peu de moyens, permettrait un déplacement suffisant tout en restant dans le domaine du dessin rapide, de l’esquisse ou du schéma explicatif. Et peut-être bien la preuve que ce « livre » n’est pas un simple copié-collé du blog mais bien encore une nouvelle réalisation plastique.

Dans la forme que prendrait le « livre », il y a bien sûr la question du sens de lecture :

D’une certaine façon un blog se lit « à l’envers » ; le visiteur lit l’article le plus récent. Le précédent article, lui est déjà repoussé vers le bas vers le statut de « périmé » ; il faut déjà de la part de notre lecteur un certain effort pour aller chercher des articles plus anciens et ne parlons pas des premières publications qui sont enfouies des centaines de pages plus loin.

Mais raconter l’histoire d’un blog et tout particulièrement du Blog de Gertrude c’est justement remonter aux origines de cette aventure, en comprendre le sens, déceler la logique et ce qui le structure de manière si pérenne. Donc partir du début.

Réfléchir au sens de lecture amène tout naturellement au sens et à la raison d’une telle entreprise. Outre l’aspect « conservatoire » évident de l’objet, ce qui me viendrait en premier à l’esprit serait sa dimension « explicative », le besoin de rendre la construction Gertrude  « intelligible » ; et ce, pas seulement pour un éventuel lecteur mais aussi pour moi : presque seize ans après, en plongée dans les profondeurs du blog, je me perds moi-même aux détours des méandres que j’ai créés, la géographie des lieux virtuels de Gertrude m’échappent à tel point que je me fais l’effet d’être un explorateur à la recherche d’indices d’une activité disparue . L’exercice devient passionnant quant à chaque station, je tente de retrouver les motivations qui m’ont menée à ce point, les liens que j’ai pu tisser à cet instant, les dialogues avec mes interlocuteurs du moment. Écrire ce qui serait de l’ordre de l’analyse et de l’explication de ces étapes serait dessiner une carte mentale du blog.

Serais-je arrivée à un stade critique de mon aventure gertrudienne ? Est-là la raison qui s’impose ? Je ne peux à cet instant répondre à ces questions tant que je n’ai pas abouti dans le projet titanesque que je viens de décrire ; d’aucun dirait qu’il s’agit là ni plus ni moins que la énième réalisation d’un nouvel objet autour de Gertrude, tel que ceux que je réalise depuis bientôt seize ans.

Rien d’extraordinaire à cela, Gertrude s’est toujours nourrie d’elle-même.

Gertrude est en ligne depuis quinze ans et neuf mois.

Gertrude, une œuvre ?


Le blog de Gertrude, celui-là même où j’écris aujourd’hui, c’est, à cet instant, 1021 articles, 1022 avec ce dernier. Les 1021 articles ont généré 20243 commentaires.

J’ai créé le blog de Gertrude le 3 janvier 2008 pour une ou des raisons qui maintenant m’échappent : nouvelle expérimentation, vacuité du moment, espace différent et tellement plus vaste que mon appartement parisien… Probablement une convergence de circonstances. Toujours est-il que ce blog est encore là quinze ans et huit mois après ; je ne sais, du blog ou de moi, lequel mène ou « organise » l’autre au fil du temps.
Le blog de Gertrude est passé par plusieurs phases : il a changé deux fois de plateformes, d’unique il est devenu triple (en trois blogs ou trois « personnalités » aux publications simultanées), puis devenu à nouveau unique et, en quelque sorte, fusionné.
À présent il est la part « gertrudienne » du « site » juliettecharpentier.fr qui comprend également, sous forme de deux autres blogs, une compilation neutre de mes réalisations matérielles et le résultat d’une petite pratique photographique d’amateur.

Les différentes périodes du blog de Gertrude sont aussi marquées par mon interaction avec d’autres « blogueurs » ; interaction qui a pu, avant la prédominance des réseaux sociaux, être foisonnante et fertile, provoquer chez moi un bouillonnement d’émotions, d’activité et d’invention pour trouver toute sorte de prétextes à mes publications, mais également pour produire, ce qui paraît paradoxal face à l’espace virtuel d’internet, un grand nombre de réalisations matérielles en tant que supports de ces dernières. Les réalisations et les publications, parfaitement intriquées dans le réseau que forme le blog, tournent toujours de près ou de loin autour du même objet, à savoir celui que j’ai choisi en janvier 2008, le crâne prénommé Gertrude.

Gertrude à la fois matérielle et virtuelle, objet et sujet de mes préoccupations blogueuses, joue également le rôle de concept de l’entreprise tout en trainant sa charge symbolique et vaniteuse de crâne derrière elle. Et c’est bien la persistance de mon idée originelle ainsi que ce choix particulier qui créent une forme de cohérence dans ce qui n’est ni une histoire, ni un récit, ni un journal mais une sorte de chaos, de fourre-tout de n’importe quoi (surtout à ses débuts), sorte de sismographe des instants T de mes états créatifs.

La seule structure qui fait tenir ce « Merzbau » virtuel est le temps, et plus précisément celui scandé par Gertrude chaque trois du mois dans l’unique parution ritualisée depuis plus de quinze ans sans aucune dérogation de ma part. Chaque mois je vise devant moi le prochain « trois » que je perçois comme un « à venir », un « à suivre », mais aussi comme une résistance, celle que la performance exige. Aujourd’hui pour ce nouveau trois, je décide de jeter un regard derrière moi, sur (dans) ce blog, mais parviendrais-je à aller au fond, à en suivre les méandres ? Au final à en faire une œuvre ?

Gertrude est en ligne depuis quinze ans et huit mois.

Le voyage immobile du Tatou mobile.

 

Le Tatou croco de faux cuir revêtu rêve de montagnes acryliques derrière sa vitre rhodoïd. Muni de cannes à pêche, il file comme un rat mort en laine pressée, et roule en boule dans un cylindre d’écailles miroitantes.
Balançant au passage perles et verroteries aux crochets du Capitaine, il ramasse tête à queue et quatre pattes éparpillées en folie plastique. Son corps enfin articulé frôle les yeux doux des broderies reptiliennes, rebondissant sur le corps mou des mots cotonneux .
Au bout du chemin le fil hommage du faire Calder dessine Tatou en l’air face à la sainte tête tatouée paperollée tandis que la silhouette de la bête, or et argent, danse le recto-verso dans la lumière.
Voyage immobile en fragile équilibre dans l’espace, il est temps de se reposer tout ficelé dans son tuyau carapace.
Et tournent les ombres sur la surface du mur blanc …


JC, 2022-2023, Le Tatou mobile (collection particulière). Tiges acier, fil de nylon, matériaux et objets divers. Hauteur: 180cm

Cela fait exactement
quinze ans et quatre mois
que ça bouge chez Gertrude
mais que c’est toujours là.

L’os dans le gaz.

 

Depuis que le Tatou gazouille
que ça gaze en carapace
le crâne s’agace
et
il y a de l’os dans le gaz
Gertrude la Sublime
passe de l’état solide à l’état gazeux
en crânant dans la gaze
et ses images compressées



JC, octobre 2022, L’os dans le gaz et Ça gaze pour le Tatou, monotypes à la compresse* de gaze et acrylique sur papier*, 16 x 21 cm.
* Papier et compresses de gaz provenant de la maison des parents défunts de JC

Cela fait exactement
quatorze ans et dix mois
que dans ce blog
ça crâne
avec os et gaz à tous les étages

.

 

 

Les devoirs de vacances de la Crâneuse ou la collection maritime et coquillarde du Tatou fait de tout.

 

La Crâneuse en vacances ne manque jamais à ses devoirs. Cette fois la consigne est donnée par l’éminente Professeure H :

« À partir d’une coquille. »

Évidemment la consigne et la coquille valent pour un temps et un lieu donnés à savoir septembre 2022 au bord de l’amer bassin d’art cochon dont nous connaissons la richesse lit d’oral et l’inspiration lit et râle.

Chers interlocuteurs, vous trouverez ci-dessous les devoirs de vacances accomplis avec enthousiasme par votre Crâneuse collectionneuse ainsi que la grille de compétences élaborée par la Professeure H. en personne.
Vous avez ainsi tous les outils pour évaluer la pertinence du Tatou fait de tout.
(Même si vous ne comprenez pas tout du Tatou et de ce langage d’initiés bande de cancres-là.)

Les devoirs accomplis :

  • Mon premier est le tatou prêt en bulle en amorphe sphère contrôlée tapi dans son bul’eau à la laine chargée.

  • Mon deuxième est un tatou du tout trouvé et son bul’laine sur carapace.

  • Mon troisième est un tatou ready-mer à carapace tricotée et objet dard décoquilleur.

  • Mon quatrième et un tatou peint en coque dans la plus pure tradition du souvenir de l’os séant.

Mon tout est un tatou fait de tout et qui s’en tape le coquillard !

JC, septembre 2022, Le Tatou prêt en bulle, objets et matériaux divers trouvés sur le littoral du Bassin d’Arcachon, laine feutrée à l’aiguille. Dimensions approximatives. Collection particulière.

JC, septembre 2022, Le Tatou du tout trouvé, objets et matériaux divers trouvés sur le littoral du Bassin d’Arcachon, laine feutrée à l’aiguille. Dimensions approximatives. Collection particulière.

JC, septembre 2022, Le Tatou Ready-mer, Objet et coquillage percé trouvés sur le littoral du Bassin d’Arcachon. Dimensions approximatives. Collection particulière.

JC,septembre 2022, Le Tatou peint en coque, aquarelle sur os de seiche trouvé sur le littoral du Bassin d’Arcachon. Dimensions approximatives. Collection particulière.

 

La grille d’évaluation par compétences de Professeure H :
Grille universelle critique
ayant déjà fait ses preuves sur les étudiants en masse terre de la Professeure H.

Évaluations par compétences – Sujet Août 2022

COMPÉTENCES VISÉES, TRAVAILLÉES et ÉVALUÉES

 

DOMAINES DU SOCLE

 

-Choisir, organiser et mobiliser des trucs, des machins et de l’haleine iodée en fonction des effets qu’ils produisent sur le corps mou mais beau.

-S’en taper le coquillage.

 

 

Expérimenter, produire, créer du bon pied marin.

Domaines du socle : 1, 2, 4, 5

 

-Mettre les voiles et mener à bon port une production individuelle dans le cadre d’un projet accompagné par le Tatou Spirit, grand inspirateur maniable et sans fil.

-Mener à bon porc une production collective mijotée sous la conduite du capitaine au long cou.

-Mener à bon pore une production goutteuse sous l’œil humide mais averti de Gertrude, reine de la longue conservation (1).

 

 

Mettre en œuvre un projet de lard salé ou d’eau douce.

Domaines du socle : 2, 3, 4,7, 14

 

-Justifier des choix pour rendre compte du cheminement qui conduit de la coquille à l’ermitage, ou inversement.

 

S’exprimer, analyser sa pratique, celle de ses paires (de chaussures à son pied) ; établir une relation avec celle des pagures, s’ouvrir à l’altérité crustacée.

Domaines du socle : 1, 3, 5, 26, 43, 25bis

 

 

-Identifier des caractéristiques (plastiques, culturelles, sémantiques, symboliques) inscrivant une œuvre dans une aire géographique de la côte aquitaine à la banlieue parisienne par l’entremise du livreur Chronopost et dans un temps historique du Quaternaire à l’Anthropocène.

 

Se repérer dans les domaines liés aux arts place Tic, être sensible aux questions agitées du beau cal et de la vulgaire croûte.

Domaines du socle : 1, 3, 92, 132ter alinéa 4, 368C (voir nouveaux programmes – réforme du collège 2023-2024), 3652a, 441702a et b.

 

Note (1) : Gertrude est aussi la reine de la longue conversation, voir http://juliettecharpentier.fr/gertrudes/ 2008 – 2022.

Cela fait exactement quatorze ans et neuf mois que Gertrude la bien conservée et grande conservatrice des collections du n’importe quoi, converse de ses droits et de ses devoirs.

La rentrée du vain si vain.

 

Avec toutes
ces doudouteries et ces tatouteries
on oublierait presque à quel point
Gertrude est une entreprise
bête, docte, pédante et absurde.

C’est la rentrée
et on ne résiste pas
à vous en mettre une petite couche
de l’art.
C’est vain si vain
mais c’est tellement bon…

JC, avril 2009, L’histoire du l’art, petite performance à partir de vieilles diapositives gravées publiée pour la première fois  le 3 octobre 2012 sur le blog de Gertrude (vous pouvez toujours chercher).

Cela fait exactement quatorze ans et huit mois que ce crâne vous fait la leçon
bande de cancres !

Gertrudum polycephalum ou la tentation du vivant.

 

Dessins du crâne de Gertrude et sclérotes de physarum polycéphalum sur papier filtre. Diamètre : 9 cm.

La Crâneuse aux détours des méandres de son Os si mort, curieuse de tout depuis sa tendre enfance dans la contemplation des fourmis et des caméléons, n’a cessé d’observer crânes et coquilles vides, natures mortes ou silencieuses, choses vivantes mobiles ou immobiles.
Ainsi a-t-elle, l’œil en éveil et un peu par hasard, découvert il y a quelque temps un petit myxomycète* sauvage dans son jardin qu’elle a prénommé Pampa ; que faute de parvenir à élever à l’abri de son antre, elle a laissé vivre dans son milieu naturel.
L’observation de cet organisme s’est rapidement avérée compliquée par une météo corrézienne capricieuse. La Crâneuse, dans sa soif d’en apprendre davantage sur le phénomène, a donc cédé à la tentation d’acquérir via Internet un spécimen approchant, un physarum polycéphalum de souche australienne particulièrement bien adapté à la vie en laboratoire.
La Crâneuse s’est rapidement prise au jeu de la science, bichonnant et faisant croitre le petit être jaune et gluant prénommé Ricci, le nourrissant avec amour et lui fournissant tout le confort qu’exige son fragile plasmode, tout en s’émerveillant de ses incroyables capacités.
(Si les détails de cet élevage vous intéressent, retrouvez-les sur le compte Instagram dédié à Pampa et Ricci : @pampa_et_ricci ).
De ce petit élevage domestique pseudo-scientifique à la participation à la Science avec un grand « S » il n’y avait qu’un pas, et la Crâneuse, en toute logique, n’a pas manqué de candidater à une grande opération d’expérimentation participative « Derrière le blob, la recherche » organisée par le CNRS et plus précisément par Audrey Dussutour, chargée de recherche, grande spécialiste des êtres unicellulaires et des « blobs ».
À la veille de cette expérience inédite sur le réchauffement climatique qui doit mobiliser le sérieux et la rigueur exigés par toute étude scientifique, la Crâneuse a « endormi » la totalité de ses « Ricci » pour ne pas interférer avec la souche prochainement envoyée par le CNRS, déjà prénommée Céhènéresse.
La Crâneuse dans ses délires pseudo-scientifiques, voire carrément scientifiques, n’en a pas pour autant oublié sa nature plasticienne et crâneuse. Voici qu’elle se retrouve avec une cinquantaine de « sclérotes » sur papier filtre, état intermédiaire de sommeil ou de vie suspendue que le myxomycète adopte en cas de pénurie nutritive et hydrique, et dans lequel il peut rester indéfiniment dans l’attente de conditions adéquates à son réveil et son développement.
Profitant de ce temps de latence entre deux aventures « blobesques », la Crâneuse s’empare de ces supports dessinés par les hasards logiques de la nature afin d’y mener quelques expériences plastiques et pourquoi pas crâner un peu…
Gertrude n’est-elle pas polycéphale ?

 

*Les myxomycètes sont des organismes unicellulaires ni végétal, ni animal, ni champignon. Outre quelques souches étudiées en laboratoires, il en existe un très grand nombre la plupart vivant en milieu naturel . Ils sont communément surnommés « blob » pour leur caractère gluant et invasif en référence au film de SF « The Blob » de 1988. Les myxomycètes, bien que dénués de cerveau, sont presque immortels et possèdent des capacités étonnantes d’apprentissage et d’adaptation.

Physarum polycéphalum sur gélose dans boite de Pétri photographié sur fond bleu. Diamètre : 9 cm.

Essais d’aquarelle à partir de physarum polycéphalum.

Sclérotes sur papier filtre.

Dessins à l’aquarelle et crayon réalisés « en miroir » à partir de sclérote de physarum polycéphalum. Diamètre : 9 cm.

Aperçu de l’élevage du »blob ».

Os qui roule…

 

En attendant
la soirée mousse de la vaine ânée
le moussaillon Gertrude
de ce rafiot moussu
se fait mousser en verte mousse
sur une meule
qui ne tourne plus rond.

Un os qui roule
amasse-t-il de la mousse
pour autant ?


JC, novembre 2021, L’os qui roule, mousse de jardin installée sur une ancienne meule de moulin.

Cela fait treize ans et onze mois
que Gertrude tourne autour de l’os
broie du vain
fait mousser les mises en bière
et enfarine la Toile.


Cet article meunier est dédié à l’âne qui jadis portait le grain sans glisser sur la mousse ainsi qu’à Anne Hecdoth fidèle interlocutrice qui aime bien tourner autour du pot et en ferait bien son pain (beurre).

Gertrude ou l’expérience de « l’horror vacui ».

 

Gertrude préfère le plein au vide
et la vie à la plainte

JC, avril 2021, Gertrude, exercices d’Horror vacui, brou de noix, crayon aquarellable, fusain, craie, encre de gravure sur papier,
chaque élément environ 25 x 38 cm.

Cela fait treize ans et quatre mois
que la Crâneuse s’exerce
à l’Horror vacui
en remplissant le Rien de Vain

Le GertrudavirOs (G-Os-Vain ).

Cela fait douze ans et un mois
que la Crâneuse
a attrapé le GertrudavirOs.

Elle se soigne
mais c’est un syndrome crânique.

Mutatis mutandis,
les formes pathos-logiques
de cette maladie inspirée
à évolution indéterminée
sont
le Gertrudaviros-naturel,
le Gertudaviros-sombre
et le GertrudaVie-Rrose.

Malgré tous les efforts
de confinement en pression positive

en ces lieux pleins de courants d’air
la contamination n’est pas exclue.


Et d’ici qu’elle devienne virale
sur les résOs…

JC, janvier 2020, Le GertrudavirOs ou G-Os-Vain,
pâte polymère à cuire, petit bocaux de récupération, étiquettes imprimées,
chaque élément 4,5 x 4,5 x 5 cm