Nous avons rempli quelque deux cents cartons avec nos différents objets, vêtements, livres. Nous avons jeté ou donné autant.
J’ai, entre autre, soigneusement rangé Gertrude et son atelier-étagère en caisses.
Nous y avons passé tout l’été.
Puis nous avons déménagé, enfin presque. Le tout a été chargé dans un grand camion pour être déchargé à cinq cents kilomètres de là dans un entrepôt. Depuis nous vivons dans un gite avec le minimum de nos affaires pour pouvoir « fonctionner » au quotidien. Cela fait à présent deux mois et quelques jours que nous attendons de nous installer définitivement dans notre petit paradis actuellement en travaux.
Trois petites choses ont pourtant échappé à cette organisation bien huilée ; trois petites choses tombées derrière mon étagère sont passées à côté de la mise en boite : Un ouvrage d’Henri Michaux, « Misérable miracle », une représentation de mon crâne Gertrude, dessin numérique à partir d’une photographie, collé sur du carton, et ce texte de neuf pages intitulé « … est bien d’être enfilées » (succédant à un autre « Le destin des perles... » mais un peu, depuis, oublié), écrit il y a plus de vingt ans avec toute l’immodestie de celle qui se prenait pour une artiste.
Nous les avons découvertes là, par terre dans la poussière, après le départ des déménageurs.
Je les ai ramassées en même temps que les éponges, torchons et balais qui nous avaient servis à faire le ménage de notre location avant l’état des lieux de sortie.
« Rien n’était prévu, mais rien ne sera laissé au hasard » est la célèbre devise gertrudienne, ligne de conduite de mes activités absurdes. C’est une formule ouverte qui laisse la place à l’inattendu, portant une attention telle à ce dernier qu’elle en fait un projet.
Ces trois choses oubliées font donc signe et s’inscrivent naturellement dans ce principe.
Je les laisse ici à votre regard. Lirez-vous le texte ?
Pour moi, il était temps; peut-être.
Cela fait exactement dix ans et dix mois
que la Crâneuse s’y retrouve
grâce à Gertrude.