14 juillet 2008: Chronométrage numéro Neuf.

 
Absurde Défilé.

Neuvième Chronométrage
sur les lieux
d’un ancien Commentaire.

Hypothétiques Réponses
après cinq mois de


Conversations.

Performance réalisée un jour de la deuxième semaine de juillet deux mille huit
entre le 15, Avenue Junot, et le 20, Avenue Rachel, Paris, 18ème.

Les chinois voient l’heure dans l’œil des chats
 (…)
Et si quelque importun venait à me déranger pendant que mon regard repose sur ce délicieux cadran, si quelque génie malhonnête et intolérant, quelque démon du contre-temps venait me dire :
« Que regardes-tu là avec tant de soin ? Que cherches-tu dans les yeux de cet être ? Y vois-tu l’heure, mortel prodigue et fainéant ? »
Je répondrais sans hésiter :
« Oui, je vois l’heure ; il est l’Eternité ! »

Charles Baudelaire, L’horloge,
Le spleen de Paris.

Architectures sur
gertruderosecelavi.over-blog.com

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ANNIVERSAIRE!
7 Juillet 2008

Gertrude chemine en Révolution précaire à la rencontre des rapprochements improbables.
Soufflez la huitième bougie :

14 juillet 2008: Architectures.

Que chaque homme crie:
il y a un grand travail
destructif, négatif, à accomplir.

Tristan Tzara, Manifeste DADA, 1918.

Objets divers, Briques de la commémoration de la prise de la Bastille, 1989

    Qu’est-ce qui vaut davantage, un kilo de pierre ou un kilo d’or ? La question n’a l’air ridicule que pour le commerçant. L’artiste répondra :  « Pour moi, tous les matériaux sont également précieux. »
La Vénus de Milo aurait autant de valeur si elle était en pierre à gravier – à Paros on gravillonne les rues avec du marbre de Paros – ou en or. La Madone de Saint-Sixte ne vaudrait pas un sou de plus si Raphaël avait mélangé quelques livres d’or à ses couleurs. Un commerçant qui devrait envisager de fondre une Vénus d’or ou de gratter la Madone de Saint-Sixte serait naturellement obligé de raisonner en d’autres termes.
    L’artiste n’a qu’une ambition : il veut dominer son matériau de telle manière que son travail devienne indépendant de la valeur de ce qu’il met en œuvre. Malheureusement nos constructeurs ignorent tout d’une telle ambition. Pour eux un mètre carré de mur en granit a plus de valeur qu’un mètre carré de mur en mortier.
    Le granit en soi n’a pourtant aucune valeur. Il forme des chaînes de montagne, où il suffit d’aller se servir. Avec le granit on gravillonne les rues, on pave les villes. C’est la pierre la plus commune, le matériau le plus commun que nous connaissions. Et pourtant il est des gens qui le tiennent pour notre plus précieux matériau de construction.
    Ces gens disent matériau et pensent travail . Travail humain, savoir-faire et art. Car le granit exige beaucoup de travail. Il en faut pour l’arracher aux montagnes, il en faut pour l’amener à son lieu de destination, il en faut pour lui donner la forme convenable, il en faut pour le tailler et le polir. Alors devant un mur de granit poli, notre cœur se mettra à battre. Nous nous sentirons envahis d’un sentiment de vénération. Devant le matériau ? Non pas : devant le travail humain.

    Donc le granit serait tout de même plus précieux que le mortier ? Ce n’est pas ce que nous voulons dire. Car une paroi avec des décorations en stuc de Michel-Ange éclipsera même le mur de granit le mieux poli. Ce qui détermine la valeur d’un objet, ce n’est pas seulement la quantité de travail investi, mais aussi sa qualité.
    Nous vivons en un temps où la quantité de travail fourni compte par-dessus tout. Celle-ci est facile à calculer, elle frappe chacun d’emblée et n’exige ni regard exercé ni connaissances particulières. Là il n’y a pas d’erreur. Tant d’ouvriers ont travaillé pendant tant d’heures pour tel salaire. Chacun peut faire le compte. Nous aimons à dire à tout le monde la valeur des choses qui nous entourent. Dans cette optique, les matériaux qui réclament le plus long travail seront aussi les plus considérés.
    On n’a pas toujours pensé ainsi. Autrefois on construisait avec les matériaux les plus aisément accessibles. En maintes régions avec de la brique, en d’autres avec de la pierre, ailleurs encore les murs étaient recouverts de mortier. Ceux qui construisaient ainsi se sentaient-ils inférieurs à l’architecte qui utilisait la pierre ? Pourquoi donc ? Une telle pensée ne venait à l’esprit de personne. Si on avait disposé de carrières dans les environs, on aurait construit en pierre. Amener de loin des pierres destinées à la construction paraissait plus une affaire d’argent qu’une question d’art. Et jadis l’art, la qualité du travail, comptait plus que de nos jours.


Adolf Loos, Paroles dans le vide, matériaux de construction, 1898,
Edition Champ libre, 1979.

Maintenant, vous pouvez aller (vous) défiler sur
gertrude

Lude.

Mais les vrais dadas sont contre DADA.

Tristan Tzara, Dada manifeste sur l’amour faible et l’amour amer.

La négation réelle de la culture est seule à en conserver le sens. Elle ne peut plus être culturelle. De la sorte elle est ce qui reste, de quelque manière, au niveau de la culture, quoique dans une acception toute différente.


Guy Debord, La société du spectacle, 1967,

ed Gérard Lebovici,
champ libre,1988

Prochain article le quatorze juillet deux mille huit.

Interlude.

 
MUSICIENS CASSEZ VOS INSTRUMENTS AVEUGLES

sur la scène

TristanTzara, Proclamation sans prétention.

Le dadaïsme et le surréalisme sont les deux courants qui marquèrent la fin de l’art moderne. Ils sont, quoique d’une manière relativement consciente, contemporains du dernier grand assaut du mouvement révolutionnaire prolétarien; et l’échec de ce mouvement, qui les laissait enfermés dans le champ artistique même dont ils avaient proclamé la caducité, est la raison fondamentale de leur immobilisation. Le dadaïsme et le surréalisme sont à la fois historiquement liés et en opposition. Dans cette opposition, qui constitue aussi pour chacun la part la plus conséquente et radicale de son apport, apparaît l’insuffisance interne de leur critique, développée par l’un comme par l’autre d’un seul côté. Le dadaïsme a voulu supprimer l’art sans le réaliser ; et le surréalisme a voulu réaliser l’art sans le supprimer. La position critique élaborée depuis par les situationnistes a montré que la suppression et la réalisation de l’art sont les aspects inséparables d’un même dépassement de l’art.

Guy Debord, La société du spectacle, 1967,
ed Gérard Lebovici,
champ libre,1988

Prochain article le quatorze juillet deux mille huit.