Rose au petit point

 

 

Cela fait sept ans et huit mois

que Gertrude se prend pour une Rose

 

 

Rose au petit point

 

Le plus bouleversant fut sûrement la vue de ces petites choses dérisoires et intimes, brosse à dents debout dans un verre, gant de toilette toujours accroché au lavabo, médicaments… Et son lit.

Un lit fait, bien tiré ; draps à fleurs et chemise de nuit pliée pour un prochain retour qui n’a jamais eu lieu. J’écartai les draps de coton pour y glisser ma main, comme pour prendre contact avec l’absence encore irréelle.

À la tête du lit, un seul objet accroché au mur : une rose encadrée d’ovale que je crus imprimée sur la toile ; mais à la regarder de plus près, puis chez moi à la loupe, je vis que le motif était réalisé au petit point, au minuscule petit point d’un fil.

Les tâches sur la toile, visiblement ancienne, n’enlèvent rien à la délicatesse du travail ; le statut d’objet élu, seul à la tête du lit, indique l’importance que Madeleine donnait à ce petit canevas,  que j’imagine être l’œuvre d’une jeune fille, Jeanne, sa mère, ma grand-mère (j’hérite de sa belle petite encyclopédie d’ouvrages de dames) ou de Mélanie la couturière, mon arrière grand-mère.

 

 

 Juliette Charpentier, Le Cahier de Jeanne, 2015 (extrait)

 

Rose au petit point

 

 

 

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