Bricolage.

Silence, on relique.
Prochain article:
Premier juillet deux mille huit.


       
        Une forme d’activité subsiste parmi nous qui, sur le plan technique, permet assez bien de concevoir ce que, sur le plan de la spéculation, put être une science que nous préférons appeler « première » plutôt que primitive : celle communément désignée par le terme de bricolage. Dans son sens ancien, le verbe bricoler s’applique au jeu de balle et de billard, à la chasse et à l’équitation, mais toujours pour évoquer un mouvement incident : celui de la balle qui rebondit, du chien qui divague, du cheval qui s’écarte de la ligne droite pour éviter un obstacle . Et, de nos jours, le bricoleur reste celui qui œuvre de ses mains, en utilisant des moyens détournés par comparaison avec ceux de l’homme de l’art. Or, le propre de la pensée mythique est de s’exprimer à l’aide d’un répertoire dont la composition est hétéroclite et qui, bien qu’étendu, reste tout de même limité ; pourtant, il faut qu’elle s’en serve, quelle que soit la tâche qu’elle s’assigne, car elle n’a rien d’autre sous la main. Elle apparaît ainsi comme une sorte de bricolage intellectuel, ce qui explique les relations que l’on observe entre les deux.
        Comme le bricolage sur le plan technique, la réflexion mythique peut atteindre, sur le plan intellectuel, des résultats brillants et imprévus. Réciproquement, on a souvent noté le caractère mythopoétique du bricolage : que ce soit sur le plan de l’art, dit « brut » ou « naïf » ; dans l’architecture fantastique de la villa du facteur Cheval, dans celle des décors de Georges Méliès ; ou encore celle, immortalisée par les Grandes Espérances de Dickens, mais sans nul doute d’abord inspirée par l’observation, du « château » suburbain de M. Wemmick, avec son pont-levis miniature, son canon saluant neuf heures, et son carré de salades et de concombres grâce auquel les occupants pourraient tenir un siège, s’il le fallait…
        La comparaison vaut d’être approfondie, car elle fait mieux accéder aux rapports entre les deux types de connaissance scientifique que nous avons distingués. Le bricoleur est apte à exécuter un grand nombre de tâches diversifiées ; mais à la différence de l’ingénieur, il ne subordonne pas chacune d’elles à l’obtention de matières premières et d’outils conçus et procurés à la mesure de son projet : son univers instrumental est clos, et la règle de son jeu est de toujours s’arranger avec les « moyens du bord », c’est à dire un ensemble à chaque instant fini d’outils et de matériaux, hétéroclites au surplus, parce que la composition de l’ensemble n’est pas en rapport avec le projet du moment, ni d’ailleurs avec aucun projet particulier, mais est le résultat contingent de toutes les occasions qui se sont présentées de renouveler ou d’enrichir le stock, ou de l’entretenir avec les résidus de constructions et de destructions antérieures. L’ensemble des moyens du bricoleur n’est donc pas définissable par un projet (ce qui supposerait d’ailleurs, comme chez l’ingénieur, l’existence d’autant d’ensembles instrumentaux que de genre de projets, au moins en théorie) ; il se définit seulement par son instrumentalité, autrement dit, et pour employer le langage même du bricoleur, parce que les éléments sont recueillis ou conservés en vertu du principe que « ça peut toujours servir ». De tels éléments sont donc à demi particularisés : suffisamment pour que le bricoleur n’ait pas besoin de l’équipement et du savoir de tous les corps d’état ; mais pas assez pour que chaque élément soit astreint à un emploi précis et déterminé. Chaque élément représente un ensemble de relations, à la fois concrètes et virtuelles ; ce sont des opérateurs, mais utilisables en vue d’opérations quelconques au sein d’un type.

Claude Lévi-Strauss, La pensée sauvage. La science du concret.

Aller-retour sur

gertruderose

Kronos Maître (N°7)

Continue à avancer,
Gertrude,
sur le fil du temps,
ne tombe pas,
ne te retourne pas,
regarde droit devant toi.
La lumière est au bout du chemin.

Tu es Le Mat.

Performance réalisée le onze juin deux mille huit à dix heures.

Le texte dit est La lettre à la voyante d’Antonin Artaud.
Le Médium utilisé est le Bitume de Judée.

Le Mat (ou le Fou) est le seul Arcane du Tarot de Marseille qui n’est pas numéroté; il s’obtient quand la somme des nombres des lames en présence est égale à XXII.
Il est donc hors du Jeu, en marge de la Cité de la Raison.
Il avance droit devant lui . Il a tout abandonné jusqu’à sa conscience. Il ignore volontairement le danger qui le talonne et qui fatalement le frappera.
Il regarde le ciel et ne se soucie pas des obstacles. Comme un funambule, le Mat part à l’aventure au bord d’un précipice.
Pourtant il oublie qu’il cache dans le trésor spirituel de sa maigre besace la valeur la plus élevé du Jeu, celle qui est au delà, qui est non le vide mais la vacuité du détachement des choses matérielles et dont la somme des chiffres est réductible au nombre IIII, symbole de la Totalité,  de l’Universalité.

Il est en marche.

L’Arcane Sans Nom, lui, porte le nombre XIII ; la somme de ses chiffres est aussi égale à IIII .
Un jour tout se terminera au fil de sa Faux.


Prise de contact n°2.

 
Des inconvénients de

l’élasticité

dans la persistance
 
mémorielle.

Performance réalisée le quatre juin deux mille huit vers midi.

Avertissement:
La violence des images et de la bande son* de ce document vidéo est susceptible de bouleverser certains adeptes du Crâne.

*Où vous découvrirez que Gertrude écoute aussi Léo Ferré.

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ANNIVERSAIRE!
6
Juin 2008

Gertrude joue à se faire peur ;
Va-t-elle tout perdre dans l’expérience de l’Élasticité et prendre le risque de la mise à nu ?
Soufflez la septième bougie :

 

3 juin 2008: Chronométrage n°6

Des limites de l’Anthropométrie dans la mesure de l’Incommensurable.
Hommage raté à Roman Opalka

Performance réalisée fin mai 2008.

Avec
Trois photographies.

Trois morceaux de musique de Patti Smith:
    – Kimberly, 1975
    – Kimberly, 2005
    – My Generation, 2005

Cela fait cinq mois que
Gertrude vogue la Galère


Le  petit mois de Mai* est mort
&
Opalka ne peut rien pour moi.


*Continuez votre petite promenade désespérée sur
l’excellent
sarkobasta.over-blog.com

Dissection n°3: Considérations sur la Délocalisation de l’Interface.

Cours de sciences hypophysiques à
un Autruchon blogueur
ou

les élucubrations de Gertrude
sur une côte de mailles bleue
à bruit secret.


(A bruit secret)
    Tel est le titre de ce « ready-made aidé »: une pelote de ficelle entre deux plaques de cuivre réunies par quatre longs boulons. A l’intérieur de la pelote de ficelle, Walter Arensberg ajouta secrètement  un petit objet qui produit un bruit quand on le secoue. Et à ce jour je ne sais ce dont il s’agit, pas plus que personne d’ailleurs.
    Sur les plaques de cuivre, j’inscrivis trois courtes phrases dans lesquelles des lettres manquaient ça et là comme une enseigne au néon lorsqu’une lettre n’est pas allumé et rend le mot inintelligible.


Marcel Duchamp, Duchamp du signe, A propos de moi-même.

Gertrude et les épingles.

Désensablement:
rester à la surface

Relique du monogramme, 2008.
Monogramme brodé, feutre, verre bombé, épingles, pate à cuire photographies découpées.
5 x 18 x 18 cm


Six images spéculaires montées en épingle dans le miroir.

Alors, la lampe au bec d’argent reparaît à la surface, et poursuit sa marche, à travers des arabesques élégantes et capricieuses.


Isidore Ducasse, Comte de Lautréamont,

Les Chants de Maldoror – Chant II


Le Monogramme brodé a été acheté sur Internet le 6 octobre 2007, le verre bombé le 17 juillet 2007.

Collage Collégial: Une Relique d’exception.

Le Capitaine a déménagé son atelier pendant une semaine et embarqué dix-huit matelots expérimentés sur son frêle* esquif .

*
« Un bateau frêle comme un papillon de mai. » Arthur Rimbaud


Relique Collégiale, mai 2008, technique mixte, 21 x 26 cm

1-    Le 13 mai 2008 à 10h45, un chewing-gum donné par Jean-Luc. Ce chewing-gum est énergétique comme le E de Gertrude ; il est de la même couleur que le T-shirt de la jeune fille inconnue dont le prénom commence par G ;

2- Le 13 mai 2008 à 11h25, un dessin donné par Paul. C’est un portrait d’Oscar, un soupirant de Gertrude ; il lui envoie un message personnel.


3- Le 13 mai 2008 à 11h30, un bijou en cuivre donné par Stéphanie. Ce bijou venu d’ailleurs rappelle beaucoup de souvenirs à Gertrude.


4- Le 13 mai 2008 à 11h40, un dessin donné par Cécile : il s’agit du portrait de dos de la jeune fille inconnue dont le prénom commence par G. On ne connaît pas son visage ; elle assiste au duel entre Oscar et la Madone jaune.


5- Le 13 mai 2008 à 11h45, la Madone jaune donnée par Marina. La Madone est jaune de peur à la vue d’Oscar ; elle n’a que son regard pour l’affronter ainsi que sa longue tresse ornée d’un coquillage venu d’une plage lointaine.


6- Le 13 mai 2008 à 11h47 une étiquette donnée par Patrick. C’est la preuve qu’il achète ses perles en bois dans un magasin de Bricolage.


7- Le 13 mai 2008 à 11h50, l’empreinte du petit cochon rose donnée par Céline. Le Petit Cochon Ailé a bien mis son nez dans cette affaire.


8- Le 13 mai 2008 à 11h55, la citation de Shakespeare* donnée par Stéphane. Aucun commentaire à part la citation.


9- Le 13 mai 2008 à 14h08, les porcelaines données par Eve. Plantées de part et d’autre de la trace du cochon elles gardent l’entrée du Temple.


10- Le 13 mai 2008 à 14h20, le papier cuisson donné par Chantal. Ce papier garde l’empreinte des nourritures terrestres, sous lesquelles se cache l’œil  cerné de dentelles.


11- Le 14 mai 2008 à 9h35, l’œil cerné de dentelle donné par Brigitte. L’oeil est caché dans le papier cuisson et vous regarde.


12- Le 14 mai 2008 à 11h50, le nom de GERTRUDE découpé dans du papier noir donné par Cécile. Il est absolument nécessaire pour prouver que la Madone est bien innocente.


13- Le 14 mai 2008 à 15h05, le petit avion jaune donné par Fred. C’est un nouveau Miracle de l’Aéropostale sous la forme d’un avion miniature qui échappe à notre contrôle.


14- Le 15 mai 2008 à 9h25, le négatif photo donné par Laure. C’est tout ce qui se passe en creux de notre réalité sur une si fine pellicule.


15- Le 15 mai 2008 à 9h45, le cachet d’aspirine donné par Fabienne. C’est un cachet chargé d’affect qui redonne santé au Crâne.


16- Le 15 mai 2008 à 12h50, le petit livre donné par Sophie. Il n’y a pas d’histoire seulement des mots.


17- Le 16 mai 2008 à 9h20, Didier nous donne enfin la clé, mais il faudra casser la vitre pour la récupérer.


18- Le 16 mai 2008 à 14h, Daniel a attendu que la Relique soit scellée pour donner la dernière page de son roman policier en anglais. La dernière page nous raconte le dénouement** de l’histoire, elle se situe, bien sur, à la fin, cachée à l’arrière de la relique.


* « That skull had a tong in it and could sing once (…) Not one now to mock your own grinning?« 
W Shakespeare, La tragique histoire d’Hamlet, prince du Danemark.
** « Not black or white. Just the blue race. »



Le cilice de Gertrude
nous rappelle nos petites culpabilités
et les scelle à jamais dans la Relique.
Les neuf infinis détails du crâne constellent son pourtour de miroir.
Gertrude a les yeux fixés sur l’azur du ciel des Alpes.

Gertrude remercie ses amis et camarades, dix-huit généreux donateurs* qui lui ont confié leurs trésors et fourni matière à cette Relique composée et assemblée par Juliette Charpentier le 16 mai 2008 dans le Val de Marne.

Cet article leur est dédié.


* Aucun d’eux ne connaissait véritablement l’univers de Gertrude. Les miraculeuses connivences des objets avec Gertrude ne sont dues qu’au hasard qui n’existe pas dans les champs magnétiques de l’ entente collégiale.

Le Frêle Esquif de mai a été acheté sur internet le 13 juin 2007.
Il contenait à l’origine une composition florale
réalisée par une dame qui a
 » quatre enfants et un merveilleux mari. »